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LA GAZOUILLETTE DE BORDEAUX

Newsletter : supplément à La Revue des Dossiers d’Aquitaine, carte presse 0998, cppap n°0119G84422, N°103, 23 août 2016

LE RETOUR DES COINS-COINS

Le Président François Mitterrand avait introduit deux couples de canards dans le parc de l'Élysée. Il portait tant d'affection aux palmipèdes qu'il a fait promettre à son successeur Jacques Chirac de veiller sur leur bien-être. Une méchante rumeur a laissé entendre que le chien de Claude Chirac, fille du Président, aurait dévoré un couple de canards. Démenti de l'Élysée, néanmoins constat que deux canards se sont volatilisés et qu'il a fallu faire appel au Comité des chasses présidentielles pour fournir un nouveau couple de colverts (Le Point, sept 1995, janv 2007). Les Guignols de l'Info ont médiatisé l'affaire montrant un Chirac s'ennuyant à l'Élysée et allant discuter et demander de judicieux conseils aux gentils "coins-coins".

"Un amour de canetons", cliché Roger Portal. Carte postale disponible et gratuite. Prévoir un timbre si envoi par La Poste à votre adresse.

Quelle belle image d'une maman-cane promenant ses canetons jaunes qui la suivent à la queue leu leu ou encore se perchent sur son dos. En Aquitaine (en Charente comme en Limousin, Dordogne, Béarn sans oublier la Gironde et les Landes) le canard, admiré, cajolé mène une vie de roi dans la mare de la ferme familiale. Hélas, les petites propriétés ont disparu au profit de gigantesques surfaces agricoles de 500 à 1.000 hectares. Le canard de la ferme du grand-père n'existe plus que dans les romans ou les images d'Épinal. De gigantesques centres d'élevage et de gavage menés par le lobby de l'agroalimentaire envahissent la Belle Aquitaine d'Aliénor.

Les canards sont passés de l'état de prince à celui d'esclave. Enfermés dans des cages en batterie où ils peuvent ni se lever, ni se retourner, ni déployer leurs ailes, les mâles seulement (les femelles sont exterminées dans l'œuf ou broyées à la naissance) sont soumis au gavage automatique par pompe hydraulique. Subissant un tel choc alimentaire, l'animal est pris de halètements puis de diarrhées en raison de son foie hypertrophié (10 fois le volume normal). L'animal au quatre-vingtième jour de son existence, entassé dans des caisses, est envoyé à l'abattoir pas souvent en règle avec la législation comme l'ont montré récemment diverses vidéos de l'Association L 214 Éthique et Animaux. Étourdi, saigné, plumé, éventré, le coincoin 2016 n'aura jamais vu ni la mare, ni le soleil, encore moins la lune.

Vivant dans leurs excréments, ne tenant plus sur leurs pattes, malgré les doses d'antibiotiques et autres médicaments (que le consommateur de foie gras absorbera allègrement, à son tour), les volatiles encagés ne peuvent que contacter des maladies comme l'influenza aviaire décelée le 24 novembre 2015 en Dordogne. Les autorités sanitaires par des mesures énergiques ont stoppé l'épidémie. Et le 15 août 2016, les autorisations d'élevage et d'ouverture des abattoirs ont été accordées. Et c'est par lots de 10.000, 20.000... 50.000 que des "canetons d'un jour" issus des couvoirs automatisés, arrivent, à nouveau, dans les fermes industrielles. L'épizootie 2015, malgré les nouvelles directives réapparaîtra fatalement. Car, s'il existe encore dans le sud-ouest et dans un faible pourcentage, quelques fermes familiales, ces dernières endettées par les nouvelles normes sanitaires, petit à petit, disparaîtront alors que l'élevage industriel fortement subventionné tirera bénéfice de l'affaire.

La Gazouillette, amie des coins-coins, ne lance pas un appel à boycotter la consommation de magret ou de foie gras, mais un appel à la vigilance sur l'origine des produits. Pour se faire une idée, elle vous invite à visiter les élevages. La plupart des producteurs seront ravis de vous recevoir. Et puis si vous voulez faire une bonne action, adoptez un coin-coin, quelques mètres carrés de terre et d'eau lui suffisent. Vivons heureux !




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